en réponse à Et moi et moi et moi! envoyé par LaurentM le 09 février 2002 à 22:21:01:
Je comprends parfaitement ce que tu veux dire quand tu dis que tu veux avoir l'impression qu'un film t'est destiné... ça peut parfois ressembler à un défaut (genre: certaines personnes qui pensent que si l'histoire d'un film est trop éloignée de leur vie, de leurs idées, de leur quotidien, ça ne leur parle pas), mais j'avoue que je suis plutôt comme ça aussi... C'est pour ça que Pola X me touche tant... C'est vrai que le bouquin de Melville est déjà splendide, ce qui peut aider... Mais ce qui est fort, c'est que Carax réussit à intégrer dans son univers un monde qui lui est a priori étranger (puisque, par exemple, c'est une transposition d'un récit qui se passe aux USA au 19ème siècle), avec des thèmes très personnels, et une vraie cohérence avec ses films précédents, même si Pola X est clairement une sorte de rupture, ou de requiem (bel enterrement, dans ce cas), en tout cas quelque chose de furieusement désenchanté par rapport à Mauvais Sang, par exemple, film, disons, plus "enchanté"... Mais remarque, la mélancolie, le tragique, cela est chez Carax dans tous ses films. Disons que Pola X est probablement le plus... Désenchanté, je trouve pas d'autres mots. Poignant (d'une beauté qui fait mal, comme tu dis)... Et malgré ses rares défauts (une ou deux scènes un peu moins maîtrisées que les autres, comme -selon moi, attention !- celle où Pierre va à l'émission télé), c'est celui que je préfère.
Pour en revenir aux Amants, moi aussi, ça reste un très bon souvenir cinéma, avec tout ce qu'il y autour... J'attendais le film comme un fanatique, je surveillais les programmes des salles de ma ville... Je me souviens, je gonflais l'exploitant du cinéma qui allait le passer avec la même question: "Et Les Amants du Pont-Neuf ?? C'est pour bientôt ??"... Et puis un jour de 1991 (au mois d'octobre, si mes souvenirs sont bons), le film arrive... Pas de pot, c'est sur le plus petit écran d'Ajaccio... Une ancienne salle porno, minable... Tant pis. J'y vais. Et ce fut le bonheur total. Le film était si intense, si beau, que j'ai complétement oublié la médiocrité de la salle, la petite taille de l'écran... Inoubliable. 1991 était une très belle année de cinéma en France, avec Le Parrain III, Danse avec les Loups, Alice, Edward Scissorhands, Barton Fink et Miller's Crossing... J'étais encore au lycée... c'est loin tout ça, très loin... Une autre époque, j'étais quelqu'un d'autre... Vieillir, c'est connaître plein de petites morts invisibles (certaines plus directement dans ta chair, du genre qu'on oublie pas)... Très loin.
Pour le cinéma... je crois que... ça m'est vital. J'ai compris que ça l'était en 1987, avec Full Metal Jacket. ça me fait respirer. Truffaut a dit: "Le cinéma m'a sauvé la vie". J'irais pas jusque là, mais en tout cas, il donne du courage, nous interroge, nous ouvre au monde... C'est ça son rôle pour moi, nous unir aux visions d'un artiste, et, à travers celles-ci, nous unir au monde... En nous permettant de mieux savoir qui nous sommes. Pour moi, le cinéma est l'art total au sens wagnérien, la somme... Mais j'adore aussi la peinture, la littérature, la musique... L'art. voilà ma passion sur cette Terre. Et le cinéma m'a permis de m'intéresser aux autres formes d'expression artistique (même si en fait, quand j'étais gosse, ma toute toute première passion était la BD)...
Pour revenir deux secondes sur Paris, c'est une ville qui me fascine (la ville, pas forcément ses habitants)... Elle est tellement liée à des livres, des films, des artistes de tous les pays... Henry Miller, par exemple... Un dieu, pour moi... J'y suis allé en septembre 1999, et je suis allé sur le Pont-Neuf... Beau souvenir... Juste quand j'y vais, un feu d'artifices éclate dans le ciel, à l'occasion des premières fêtes autour du proche passage à l'an 2000... Belle coïncidence, sympa...
Bon, stop les souvenirs, je vais me mater un film que je n'ai pas vu (le dernier Boorman)...
A bientôt !
A.